Les professionnels du bâtiment s’inquiètent d’une baisse importante des commandes de maisons neuves ces derniers mois en Bretagne. Un véritable séisme à venir pour les notaires, constructeurs, architectes et artisans, contraints de se réinventer pour survivre.
C’est une page qui se tourne dans le secteur de la construction. “La fin du pavillon neuf“, prédit même le président de la Capeb Bretagne, Andreas Milet qui invite les artisans spécialisés dans la construction à se tourner au plus vite vers sa structure. Il faut dire que les chiffres sont éloquents : entre juillet 2023 et juin 2024, 124.600 permis pour des logements individuels ont été délivrés, soit 18,1% de moins sur un an, selon les chiffres du ministère de la Transition écologique. C’est le niveau le plus bas enregistré depuis 2000. Une tendance qui se confirme en Bretagne.
“Nous sommes à – 25% sur les deux dernières années“, estime par exemple Bruno Poupon, le président de la Fédération du bâtiment dans le Finistère. “Et les perspectives ne sont pas bonnes.” Plusieurs explications à cela : la difficulté d’obtenir un prêt, l’objectif zéro artificialisation des sols d’ici à 2050 ou encore la hausse des prix des matériaux. Une situation délicate qui a déjà poussé à la faillite plusieurs constructeurs comme le Finistérien Maisons Kervran fin juillet.
Chez Trecobat à Brest, on scrute donc avec attention les carnets de commande. “On a une vingtaine de maisons à lancer chaque mois jusqu’à la fin de l’année“, se rassure le directeur Mathieu Riou. La construction de maisons neuves représente 65% du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise bretonne. “C’est conséquent“, reconnait son PDG Alban Boyer qui a dû prendre quelques décisions inédites. “Il a fallu qu’on réactualise nos conditions de production d’une maison individuelle parce que les prix des matériaux évoluaient parfois de deux points en l’espace d’un mois. Si vous ne réajustez pas vos prix de vente, vous êtes en difficulté.“
Un budget en hausse de 30%
Mais encore faut-il que les clients suivent financièrement. “C’est un budget de 30 % supplémentaire qu’il faut désormais. Et ce sont les primo-accédants qui en font les frais et qui aujourd’hui ont beaucoup plus de difficultés à accéder à la maison individuelle s’ils n’ont pas d’apport ou pas de revenus suffisants“, analyse le patron de Trecobat.
Une évolution qui touche également les architectes. À Quimper, Maxime Kervarrec travaillait il y a encore quelques mois majoritairement sur des projets de constructions neuves. Ils représentent désormais moins de 30% de son activité. Mais lui préfère voir le verre à moitié plein : c’est l’occasion d’ouvrir un nouveau chapitre. “On va arrêter de construire sur des terres agricoles et de faire des lotissements à l’infini. On n’est pas obligé de construire des maisons comme on fait depuis 50 ans. Il y a beaucoup d’autres solutions, dont la rénovation ou la division de terrain“, estime le jeune homme.
Le président finistérien de la Fédération du bâtiment s’inquiète lui des conséquences sur l’emploi. “En l’absence de décisions politiques, c’est 300.000 emplois en moins en France en 2025“, estime-t-il.